Environnement

Dans cet espace sont présentés les différentes voies de contamination du milieu naturel, la démarche de l’évaluation du risque environnemental, les tests écotoxicologiques ainsi que les effets des résidus de médicaments sur les organismes vivants.

Environnement

L’ensemble des compartiments de l’environnement (eau, sol, air, sédiments, boues) peuvent être exposés aux résidus de médicaments en fonction de leurs propriétés physico-chimiques.

En savoir plus

Contaminations

Il existe différentes voies d’entrées des résidus de médicaments dans l’environnement. Les trois principales sont dans l’ordre croissant : les industries, les hôpitaux et les maisons individuelles.

En savoir plus

Evaluation du risque environnemental

L’évaluation du risque environnemental se fait avant la mise sur le marché des médicaments et elle permet d’aboutir à un indice de risque. L’évaluation se fait en plusieurs étapes qui sont détaillées par la suite.

En savoir plus

Ecotoxicologie

Pour évaluer la toxicité d’une substance sur les organismes vivants, on effectue des tests écotoxicologiques en laboratoire également appelés bioessais qui consistent à exposer des organismes à la substance étudiée.

En savoir plus

Les effets

Des bioessais et différentes études scientifiques ont été menés afin de pouvoir identifier les effets que peuvent avoir les résidus de médicaments sur l’écosystème. L’ensemble de ces études ont amené à la conclusion que le risque pour l’environnement est avéré et discuté.

En savoir plus

Environnement

rain drop on a leaf reflecting earth concept for environmental conservation "Elements of earth image courtesy NASA" / http://www.killerasteroids.org/

L’ensemble des compartiments de l’environnement (eau, sol, air, sédiments, boues) peuvent être exposés aux résidus de médicaments en fonction de leurs propriétés physico-chimiques. En effet, les médicaments solubles dans l’eau contaminent les eaux de surfaces ; les médicaments insolubles se retrouvent dans les sols/sédiments, alors que certains sont capables de traverser les couches du sol pour atteindre les nappes souterraines.
Les différents types de dégradation dans l’environnement entrent également en jeu dans le devenir des résidus médicamenteux. Ces transformations modifient la structure de la molécule et influent sur son devenir. Ces transformations peuvent atténuer ou au contraire augmenter la toxicité des molécules. Il existe deux grandes classes de dégradation : les dégradations abiotiques et les dégradations biotiques.
Les dégradations abiotiques prennent en compte l’ensemble des dégradations physico-chimiques dont l’une des plus abondantes dans l’environnement est la photo-dégradation (dégradation par les UV).
Les dégradations biotiques ou biodégradations sont réalisées par les micro-organismes vivants (bactéries, champignons…) et sont des mécanismes de décomposition/dégradation de la matière organique.
Les médicaments les plus préoccupants pour l’environnement sont ceux qui sont persistants (qui se dégradent peu), qui s’accumulent dans les tissus des humains ou des animaux, qui se bio-amplifient le long de la chaîne alimentaire et qui peuvent être toxiques à faible dose. La bioamplification signifie que le polluant est présent en faible concentration dans les organismes en bas de la chaîne alimentaire et augmente pour être en concentration élevée dans les organismes présents en haut de la chaîne (Homme).
Les effets cocktails des résidus de médicaments sont encore peu étudiés mais peuvent devenir un réel problème environnemental car lors de l’association de deux ou plusieurs médicaments, leurs toxicités peuvent se trouver augmentées.

Contaminations

Les résidus de médicaments sont retrouvés dans l’environnement via trois sources qui sont aujourd’hui bien connues :

  • Le rejet des industries et des hôpitaux (2% et 5 à 10% respectivement en Europe)
  • L’excrétion des médicaments après usage humain ou vétérinaire (80 à 90% en Europe)
  • La mauvaise élimination des médicaments non utilisés (MNU) dans les toilettes, évier, poubelles ménagères… (3 à 8% en Europe)

Une fois ingéré, le médicament est absorbé par l’organisme puis passe dans la circulation générale (sauf injection par voie intraveineuse où il y a passage direct dans le sang). Le médicament va ensuite être métabolisé en partie par le foie. Le terme de métabolisme fait référence à la transformation, par une réaction enzymatique, d’un médicament en un ou plusieurs autres composés actifs ou inactifs sur le plan pharmacologique. De nombreux organes peuvent réaliser cette transformation (peau, poumon, rein, foie, intestin…). Néanmoins le site principal de biotransformation est situé au niveau du foie. Le médicament est ensuite éliminé dans les selles ou l’urine sous forme inchangée ou sous forme de métabolite. Il va ensuite se retrouver dans les eaux usées qui vont être acheminées vers les stations d’épuration. Les résidus de médicaments peuvent aussi se retrouver directement dans l’environnement via les excrétions animales au sol puis se retrouver dans les eaux de surfaces par ruissellement ou dans les eaux souterraines par infiltration.

Les stations d’épuration (STEP) récupèrent les eaux usées et les traitent afin qu’elles soient aux normes de qualité de rejet dans les cours d’eau. Cependant, elles n’ont pas la capacité d’éliminer complètement l’ensemble des médicaments. L’abattement des molécules pharmaceutiques varie selon le traitement de la STEP et varie également selon le composé. La quantité de résidus de médicaments retrouvée dans les stations d’épuration fluctue selon les saisons, il existe des pics d’utilisation qui peuvent correspondre aux pics d’épidémies (grippe, gastro…) ou aux pics de population (tourisme).
Une fois dans l’environnement ce sont les propriétés physico-chimiques propres à chaque composé qui vont déterminer leur comportement dans l’environnement. Ils peuvent aller dans les différents compartiments tels que le sol, les sédiments, l’air et l’eau.

Le compartiment eau comprend :

  • les eaux de surfaces qui incluent les eaux douces, les eaux marines et saumâtres,
  • les eaux souterraines

Les différents compartiments dans lesquels peuvent se retrouver les résidus de médicaments sont schématisés ci-dessous avec l’ordre de grandeur de concentration pour chaque compartiment. Les flèches en rouge représentent le cheminement le plus fréquent.
Ce schéma montre que les résidus de médicaments peuvent être omniprésents et être en contact avec les espèces aquatiques mais aussi terrestres sur de courtes ou longues périodes et ainsi nuire à leur bien-être.

A ce jour, plus de 350 molécules ont été retrouvées dans l’environnement. Dans le monde et quel que soit le pays les classes les plus détectées dans les eaux de surfaces et les eaux usées sont les antibiotiques et les analgésiques/anti-inflammatoires.

Evaluation du risque environnemental

L’évaluation du risque se fait depuis 2006 avant la mise sur le marché des médicaments et comporte 4 étapes :

  • Identification du danger
  • Evaluation de l’exposition
  • Evaluation des effets
  • Caractérisation du risque

Ces étapes sont schématisées et expliquées ci-dessous :

 

1- L’identification du danger permet de cibler le compartiment dans lequel va se retrouver le médicament.

2- L’évaluation de l’exposition permet de définir les émissions et le devenir du médicament (transport et transformation) et les concentrations auxquelles les compartiments environnementaux peuvent être exposés.

Cette étape nécessite la détermination de la Concentration Environnementale Prédite (PEC), qui se calcule de la manière suivante :


L’excrétion correspond à l’élimination de la substance après passage dans l’organisme (le plus souvent par les reins), l’abattement correspond à l’élimination par les traitements de la station d’épuration, le volume de l’effluent est fixé à 150 litres par habitant (valeur estimée selon la consommation journalière en eau par habitant et par jour).
La Concentration Environnementale Mesurée (MEC) est obtenue à la suite de prélèvement suivi d’une analyse en laboratoire.

3- L’étape d’évaluation des effets correspond à l’estimation de la relation entre le niveau d’exposition à une substance, l’incidence et l’étendue d’un effet. Cette étape inclue des tests écotoxicologiques sur différents niveaux trophiques, généralement algues, daphnies et poissons (voir onglet « écotoxicologie » pour plus de détails). Les études peuvent être menées sur des expositions courtes durées (toxicité aiguë) et/ou sur des expositions longues durées (toxicité chronique). Ces expositions aboutissent sur des valeurs de CE50 et de NOEC ou LOEC.
La CE50 est la Concentration Efficace qui induit un effet sur 50 % de la population.
La NOEC (No Observed Effect Concentration) est la plus forte concentration testée qui n’induit aucun effet sur les organismes.
La LOEC (Low Observed Effect Concentration) est la plus faible concentration testée pour laquelle on observe un effet.

Le but de cette étape est d’obtenir une PNEC (Predicted No Effect Concentration) c’est-à-dire la plus forte concentration en substance considérée sans risque pour l’environnement. Elle est calculée avec la plus faible concentration obtenue en toxicité chronique ou aiguë, afin d’être certain de protéger les organismes les plus sensibles. La valeur la plus pertinente à utiliser dans le calcul de la PNEC est une valeur de toxicité chronique, avec une NOEC, car elle se rapproche le plus de ce qu’il se passe réellement dans l’environnement.

PNEC-calcul
Les facteurs de sécurité sont intégrés afin de compenser le manque de données des tests écotoxicologiques. En effet, les concentrations CE50, NOEC ou LOEC ne sont pas toujours déterminées pour les trois niveaux trophiques et les valeurs les plus retrouvées sont généralement des valeurs de toxicité aiguë. Les facteurs de sécurité sont déterminés par l’Agence Européenne des produits chimiques (ECHA) dans le document d’orientation technique (TGD). Moins les données écotoxicologiques sont considérées comme proches de la réalité, plus le facteur de sécurité appliqué sera important. Le facteur de sécurité varie en général de 5 à 1000.

4- La dernière étape est la caractérisation du risque qui permet d’évaluer le niveau de risque. Ce dernier est obtenu en faisant le rapport de la PEC ou MEC sur la PNEC.

indice-risque-calcul

 

⇒ Cependant, même si l’évaluation aboutit à un niveau de risque significatif pour l’environnement, ce n’est pas un paramètre pouvant empêcher la mise sur le marché.

Ecotoxicologie

Pour évaluer la toxicité d’une substance sur les organismes vivants, on effectue des tests écotoxicologiques en laboratoire également appelés bioessais qui consistent à exposer des organismes à la substance étudiée. Cette substance peut être ingérée, injectée, inhalée ou présente dans le milieu de vie de l’organisme. Les bioessais se font généralement sur trois niveaux trophiques différents : algues, crustacés et poissons. Les trois espèces sont mises en contact avec de l’eau contaminée par un produit pharmaceutique à différentes concentrations. Parallèlement un groupe d’organisme est mis dans de l’eau saine sans contaminant (groupe témoin). Mettre les organismes en contact avec différentes concentrations permet d’observer à partir de quelle concentration il y a un effet et à l’inverse lesquelles sont sans danger pour l’organisme. La durée peut être plus ou moins longue selon les données souhaitées (toxicité aiguë sur du court terme et toxicité chronique sur du long terme). Au cours de ces tests les CE50, NOEC et LOEC sont déterminées. L’ensemble des tests doivent suivre les normes existantes pour être pertinents (OCDE, ISO).
Il est important avant de réaliser les bioessais de savoir quel effet est recherché, le plus souvent c’est une inhibition de la croissance, une inhibition de la ponte, un pourcentage de mortalité, une inhibition de la mobilité.

Ci-dessous les tests les plus couramment effectués sur les organismes modèles :

algues

Test sur les algues

L’organisme modèle est Pseudokirchneriella subcapitata, c’est une algue d’eau douce. La croissance des algues est le plus souvent étudiées, dans le but de voir si l’exposition aux substances réduit leurs croissances après 72h d’exposition. C’est un test de toxicité chronique.

daphnie

Test sur les daphnies

L’organisme modèle est Daphnia magna, c’est un micro-crustacé. Le pourcentage de daphnie immobilisée après 24h d’exposition aux substances est étudié dans un test aiguë. Pour les tests chroniques, c’est la reproduction des daphnies qui est testée en dénombrant le nombre de jeunes daphnies produites à différentes concentrations d’exposition après 21 jours d’expérience.

poissons

Test sur les poissons

L’organisme modèle est Danio rerio, c’est un poisson zèbre. Pour un test aiguë, la survie des poissons en 96h d’exposition aux substances est étudiée.

Des tests de génotoxicité (effet sur l’ADN) et de cancérogénicité (capacité à générer un cancer chez l’organisme) peuvent également être réalisés.

Les effets

poissonL’ensemble des études menées sur les résidus médicamenteux ont amené à la conclusion que le risque pour l’environnement est avéré et discuté.
Les effets les plus connus des résidus de médicaments dans l’environnement sont :

  • La féminisation des poissons mâles en dessous des rejets de station d’épuration à cause de la présence d’œstrogènes, qui sont des hormones synthétiques. Les œstrogènes vont interférer avec le système hormonal des organismes, ce sont des perturbateurs endocriniens.
  • La mort des oiseaux prédateurs qui se nourrissent des carcasses d’animaux contenant du diclofénac (anti-inflammatoire).
  • L’altération du comportement de certains poissons en contact avec des antidépresseurs, benzodiazépines ou antihistaminiques (augmentation ou diminution de l’activité, diminution de l’agression, diminution du taux d’alimentation).

D’autres effets ont aussi été observés sur le comportement des oiseaux (diminution de la fréquence d’alimentation et des horaires, isolation…).